Sondage 2025 des analystes : les occasions découlant du fossé numérique du Japon

Si le Japon réussit à gravir son « fossé numérique » en 2025, on pourrait observer une accélération des mises à niveau en retard et de la croissance des sociétés de services liés aux technologies de l’information (TI).

Première publication le 22 janvier 2025 par Fidelity International.
Rédaction par Noriyuki Takizawa, analyste en recherche.
Noriyuki Takizawa est un analyste en actions spécialisé dans les sociétés japonaises de service de TI.

 

Bien que le Japon soit un chef de file dans le domaine de la robotique, il est paradoxalement l’un des rares pays où la télécopie demeure une technologie largement utilisée. Les sociétés japonaises investissent à peine dans leurs propres talents technologiques, et ce, même si on trouve dans ce pays le plus important fonds de capital de risque axé sur la technologie au monde. Ainsi, le Japon est loin derrière les États-Unis et l’Europe en matière d’adoption de l’infonuagique. L’infrastructure numérique du pays est telle que le gouvernement craint que l’économie perde 12 000 milliards de yens (77 milliards de dollars américains) par année si elle ne parvient pas à rattraper son retard d’ici 2025. À mon avis, ce sont les sociétés de services de TI, qui ont longtemps posé un frein à la transformation numérique, qui profiteront le plus de cette opération de rattrapage.

Le problème est attribuable à un réseau complexe d’entrepreneurs. Contrairement à la plupart des autres marchés développés, les sociétés japonaises préfèrent externaliser leurs tâches informatiques à des fournisseurs appelés « intégrateurs de système ». Ces derniers impartissent tout à des sous-traitants, de la fabrication de matériel au développement de logiciels. Bien que ce modèle permette aux grandes sociétés d’éviter des projets technologiques problématiques, il a également fait grimper les coûts à long terme, vidé les talents technologiques à l’interne et favorisé une approche de gestion temporaire des systèmes informatiques.

L’ironie, c’est que le Japon a plus que jamais besoin de ces fournisseurs de services de TI, alors qu’il tente de rattraper son retard numérique. Répondant à l’appel du gouvernement, les sociétés qui se précipitent vers le numérique se sont tournées vers des fournisseurs pour des transformations majeures, comme la transition vers l’infonuagique. En réaction, les fournisseurs de services de TI ont commencé à agir davantage comme des consultants offrant des solutions globales, plutôt que de régler un problème à la fois – ce qui leur donne un meilleur accès aux équipes de direction et, au bout du compte, plus d’occasions d’affaires. Les effets se font sentir immédiatement. Le Nomura Research Institute (NRI), un chef de file en transformation numérique doté d’une forte expertise en conseil, a vu son rendement des capitaux passer de 11 % en 2017 à 20 % en 20241. Fujitsu, une société encore plus connue, a aussi amélioré ses marges d’exploitation, passant de 4 % en 2024 à une estimation de 12 % en 2026, après la mise en œuvre d’une stratégie semblable à celle du NRI.

Il n’y a toutefois pas de solution rapide à la pénurie de talents technologiques. Le gouvernement japonais a prévenu en 2019 que le pays pourrait être confronté à des pénuries de personnel spécialisé en TI pouvant représenter 800 000 professionnels d’ici 2030. Certains projets pourraient être repoussés en raison du manque d’ingénieurs. Une augmentation progressive des salaires en 2025 semble plus probable à mesure que le pays approche de son fossé numérique, ce qui favoriserait les grands joueurs capables de répercuter les coûts de main-d’œuvre supplémentaires sur leurs clients. Le fait que ce sont de grandes sociétés et le gouvernement, tant au niveau central que provincial, qui sont durement touchés par cette mise à niveau numérique profitera aux entrepreneurs plus importants disposant de l’envergure et les ressources nécessaires pour gérer ce type de projets. À cet effet, les investissements ont déjà commencé à se faire sentir. L’enquête Tankan de la Banque du Japon montre que les investissements logiciels des entreprises ont connu une croissance d’au moins 10 % en 2022 et 2023 et qu’ils ont augmenté de 14 % en 2024.

Mais il vaut aussi la peine de surveiller les petits joueurs; certains sont susceptibles de devenir des occasions d’acquisition intéressantes. Il peut aussi y avoir des occasions de création de valeur lorsqu’il y a des avantages évidents – par exemple, dans le cas du récent rachat de Net One, un spécialiste de l’intégration de réseaux infonuagiques, par SCSK, un intégrateur de systèmes.

De plus, les petites sociétés dotées d’une solide équipe de direction ont le potentiel de croître plus rapidement que leurs concurrents mieux établis. La croissance rapide d’une nouvelle unité de services-conseils numériques de Simplx, spécialisée dans les systèmes de négociation sur les marchés financiers, a permis à l’entreprise d’atteindre un taux de croissance annuel composé de 32 % sur les cinq dernières années, un rythme hors de portée des plus grands joueurs. Il sera essentiel de collaborer avec les sociétés pour saisir ces occasions liées aux événements dans le secteur, ce qui pourraient être parmi les plus prometteuses de la transformation du Japon en 2025.

1 Les exercices financiers se terminent en mars au Japon.