Perspectives de placement de l’Asie pour le quatrième trimestre de 2024 – Profitez des vents de l’Est

Le recul de la croissance aux États-Unis influencera le rythme d’expansion de l’Asie, mais un tel ralentissement laissera également une certaine marge aux décideurs de la région pour réduire leurs taux d’intérêt.

Date de publication initiale par Fidelity International : 24 septembre 2024.

Rédigé par Lei Zhu, chef des titres à revenu fixe asiatiques et Noah Sin, rédacteur financier.

Lors de la Bataille de la Falaise rouge, récit mythique de l’histoire de la Chine à l’image de David et Goliath, une petite flotte réussit à défaire une puissante armada en invoquant les vents soufflant vers l’est pour embraser les bateaux ennemis. Près de deux millénaires plus tard, l’invocation des vents de l’Est demeure l’expression privilégiée en Chine pour désigner les stratégies intelligentes visant à exploiter des forces externes à son avantage.

Pour les personnes qui investissent en Asie, cette approche pourrait tout à fait convenir au quatrième trimestre de 2024. Les risques s’accumulent à l’extérieur de la région, allant d’un recul de la croissance assorti d’un virage de la politique monétaire aux États-Unis à la perspective de chocs géopolitiques. Une attitude tactique et défensive – optimiste à l’égard des obligations et sélective pour les actions – pourrait aider les investisseurs à tirer profit de ce contexte et à se préparer à des jours meilleurs.

Une liberté retrouvée vis à vis de la Fed

Depuis un certain temps, les banques centrales d’Asie sont limitées par la position plus dure de la Réserve fédérale américaine (Fed). Si elles avaient décidé de réduire leurs taux d’intérêt, elles auraient creusé l’écart avec les États-Unis et couru le risque d’un repli de leur devise respective. Or, la situation s’est inversée en septembre lorsque la Fed a enfin procédé à une baisse de taux de 50 points de base. À l’exception de la Banque du Japon, Fidelity International croit que la plupart des banques centrales asiatiques n’hésiteront pas à réduire leurs taux directeurs après les baisses de la Fed, compte tenu de leurs taux réels positifs. L’Indonésie a même anticipé la décision de la Fed en procédant à une première baisse de taux en plus de trois ans la même semaine, réduisant ses taux à 6 %, soit une baisse de 25 points de base.

De toute évidence, les investisseurs devraient se sentir plus confiants en ajoutant de la duration aux obligations de grande qualité, qu’il s’agisse d’obligations d’État ou d’obligations de qualité. Tout écho des difficultés économiques américaines se fera probablement plus sentir dans le segment des actions, où les bénéfices des exportateurs pourraient être affectés. Le marché boursier présente encore de nombreuses occasions, notamment les sociétés tirant parti de l’intelligence artificielle, de la transition énergétique et des changements dans les chaînes d’approvisionnement. Toutefois, Fidelity International mise davantage sur les valorisations et les marges de sécurité des actions pour résister à d’autres chocs à court terme.

Écart du taux des fonds fédéraux américains par rapport à celui de ses pairs asiatiques
Graphique linéaire illustrant l’écart entre les fonds fédéraux américains par rapport à ceux de l’Indonésie, l’Inde, la Corée, les Philippines, la Malaisie et la Thaïlande. La Thaïlande est en tête avec 3 % à la fin d’août 2024, la Malaisie et la Corée se rapprochant en deuxième et troisième position.
Sources : LSED Datastream et Fidelity International, septembre 2024.

Ralentissement

Évidemment, le rendement des marchés asiatiques dépend aussi des deux plus grandes économies de la région, c’est-à-dire la Chine et le Japon. La Chine éprouve des difficultés à prendre de l’essor, car les consommateurs et les acheteurs de propriétés demeurent prudents. Alors qu’il ne reste que trois mois avant la fin de l’année, la cible de croissance du PIB d’environ 5 % s’annonce difficile à atteindre. Fidelity International a réduit la probabilité de « stabilisation contrôlée » de son scénario de base (de 65 % à 55 %) et accru le risque d’un ralentissement important (à 35 %). La possibilité d’une reflation reste peu probable (à 10 %).

Par ailleurs, les autorités chinoises ont travaillé d’arrache-pied pour rétablir la confiance. En septembre, la Chine a abaissé la mise de fonds minimale pour l’achat d’une propriété, réduit à nouveau les taux d’intérêt et promis d’offrir plus de liquidités sur le marché boursier. Bien que le gouvernement chinois évite toujours de mettre en place d’importantes mesures de relance du crédit, les politiques adoptées mettent en évidence l’attention que portent les autorités à la demande intérieure, soutenant ainsi la confiance des investisseurs. La persistance de taux d’intérêt bas – qui demeurent positifs lorsqu’ils sont ajustés à l’inflation – permettra aux obligations chinoises de poursuivre leur remontée. Du côté des actions, les secteurs défensifs comme les banques et les services publics sont plus résilients. D’autres changements pourraient survenir à la réunion du Politburo d’octobre ou à la Conférence centrale sur le travail économique en fin de l’année. Il ne faut néanmoins pas s’attendre à des changements de politique drastiques, au moment où des incertitudes externes, comme les élections américaines, pèsent sur les marchés financiers.

Après avoir échappé au piège de la déflation, le Japon cherche à se prémunir contre l’inflation, dont le niveau pour l’année prochaine devrait se maintenir au-dessus de la cible de 2 % fixée par la Banque du Japon. Un tel contexte devrait convaincre la Banque du Japon de relever ses taux graduellement au cours des prochains trimestres et ainsi rapprocher le pays des taux réels positifs. La réaction volatile du marché suite à la hausse de 15 points de base de la banque centrale en juillet pourrait ralentir ses ardeurs, sans toutefois inverser la trajectoire des taux d’intérêt. Du côté des actions, les petites entreprises qui n’ont pas profité autant de la reprise au cours de la dernière année rattraperont probablement leur retard. Toutefois, tout changement apporté à la politique commerciale américaine pourrait avoir des répercussions au Japon, tout comme la course à la présidence qui pourrait représenter un autre risque extrême pour les marchés intérieurs.

Préférences des déposants chinois sondés par la Banque populaire de Chine
Graphique linéaire illustrant les préférences des déposants chinois, sondés par la Banque populaire de Chine. À la fin de juin 2024, 61,5 % des personnes interrogées ont déclaré vouloir épargner plus, tandis que 25,1 % ont déclaré vouloir consommer plus et seulement 13,3 % ont préféré investir davantage.
Sources : Wind et Fidelity International, septembre 2024. Sondage trimestriel auprès des déposants dans les zones urbaines.

Scénarios structurels

La promesse de forces structurelles favorables à l’Asie est réelle, du dividende démographique en Inde et en Asie du Sud-Est à l’avènement de l’intelligence artificielle (IA) et de la transition énergétique. Toutefois, à mesure que les marchés prendront en considération les risques à court terme, Fidelity International s’attend à un examen plus minutieux de ces scénarios structurels. Fidelity International a déjà vu un tel scénario se produire dans le domaine de l’IA. En effet, les investisseurs se sont détournés des grands producteurs de semi-conducteurs que sont Taïwan et la Corée au profit des marchés de l’Asie du Sud-Est, et ce, dans l’attente d’un regain imminent découlant de la politique monétaire.

Fidelity International affiche une certaine confiance à l’égard des perspectives à long terme de l’Inde. Le pays présente de solides paramètres fondamentaux et un rythme de croissance (prévisions à 7 % cette année) à ne pas négliger. Or, après une reprise prolongée, les valorisations de certains segments du marché boursier pourraient être trop élevées. Le dénouement des opérations de portage sur le yen est également un risque à surveiller en arrière-plan, car les spéculateurs se retirent progressivement des marchés boursiers, qui étaient jusqu’alors très populaires, voire saturés. Les perspectives des obligations indiennes pourraient être plus favorables en raison de leur ajout aux indices de référence mondiaux et des taux d’intérêt réels positifs.