Enquête 2025 auprès des analystes : Encore plus au Japon

La Banque du Japon continue de relever les taux d’intérêt et la porte reste ouverte pour d’autres hausses.

Première publication le 24 janvier 2025 par Fidelity International.
Rédigé par Peiqian Liu, économiste pour l’Asie, et Patrick Graham, rédacteur principal en placements.

La troisième hausse des taux d’intérêt par la Banque du Japon (BdJ) était largement attendue, mais le relèvement de prévisions de la BdJ en matière d’inflation, le calme relatif avec lequel les marchés ont accueilli le début de mandat de l’administration Trump et les salaires croissants dans le pays laissent entrevoir des augmentations supplémentaires.

Que s’est-il passé?

Lors de sa réunion de janvier, la BdJ a voté à 8 contre 1 en faveur d’une hausse supplémentaire de 25 points de base de son taux cible, à 0,5 %, et a promis d’aller de l’avant avec de nouvelles augmentations si l’inflation et la croissance évoluent conformément à ses nouvelles perspectives trimestrielles.

Ces dernières ont fait passer le taux d’inflation de base à un sommet de 2,7 % pour l’exercice 2024, de 1,9 % à 2,4 % en 2025 et à 2,0 % en 2026. Le relèvement des prévisions a été attribué à l’augmentation des prix du riz et à l’incidence de la récente dépréciation du yen sur les prix des importations. Les prévisions plus élevées pour 2026 pourraient être particulièrement importantes, car elles suggèrent que la BdJ estime faisable de maintenir l’inflation à sa cible de 2,0 % ou au-dessus.

Quant à la croissance, la banque n’a pas modifié ses prévisions à l’égard du PIB réel, mais elle a aussi fait preuve d’une plus grande confiance quant aux décisions des entreprises en matière de salaires et de fixation des prix : la BdJ s’attendait à d’autres hausses salariales dans le cadre des négociations printanières annuelles et, comme le marché de l’emploi est serré, à ce que les décisions des entreprises en matière de salaires et de fixation des prix continuent d’évoluer conformément aux attentes d’inflation modérément à la hausse.

Pour la première fois, la BdJ a fait allusion aux risques liés à l’incertitude politique et aux répercussions de la hausse des taux d’intérêt aux États-Unis et en Europe depuis la pandémie. Cependant, elle a également souligné la solidité de l’économie américaine et la stabilité des marchés financiers et de capitaux mondiaux.

La BdJ s’attend à ce que les taux d’intérêt réels restent nettement négatifs, créant des conditions financières expansionnistes qui peuvent fortement soutenir l’activité économique. Par ailleurs, elle a indiqué qu’elle avait besoin de temps pour examiner ses placements dans des FNB avant d’apporter de nouveaux changements à sa politique de resserrement quantitatif en vigueur.

Lors de la conférence de presse, le gouverneur de la BdJ, Kazuo Ueda, a réitéré que, même s’il n’y a pas eu de choc boursier depuis l’investiture du président Trump, des incertitudes demeurent quant à l’approche des tarifs douaniers par la nouvelle administration et la possibilité de perturbations économiques.

Notre interprétation

La hausse des taux et les révisions en matière d’inflation témoignent de la confiance de la BdJ à l’égard de la dynamique de croissance des salaires et de l’inflation. Les tendances positives actuelles au chapitre des négociations salariales et la réaction assez calme des marchés de capitaux pendant les premiers jours de la présidence de Trump offrent une occasion appropriée de faire un pas de plus vers la normalisation.
La BdJ semble à l’aise de marquer une pause pour évaluer l’incidence de son resserrement jusqu’à présent, mais même si ses décisions dépendront des données et des événements, elle poursuivra ses hausses de taux si la croissance et l’inflation évoluent conformément à ses prévisions. Les incertitudes externes et le niveau du yen seront également des facteurs importants qui influeront sur le rythme et l’ampleur de toute nouvelle hausse.

Le gouverneur Ueda a fait peu de prévisions à cet égard et a envoyé des signaux objectifs aux marchés; il a néanmoins reconnu que le taux directeur actuel est loin d’être neutre et qu’il y aura d’autres resserrements de la politique monétaire. Le risque réside dans les perspectives économiques mondiales, la situation géopolitique demeurant une priorité.

Perspectives

Tout resserrement à venir pourrait dépendre du recul de l’inflation sur les importations à mesure que le yen se raffermit ainsi que de l’évolution des économies à l’étranger, en particulier aux États-Unis et en Chine.

Le contexte extérieur reste calme jusqu’à présent, mais nous surveillons de près tout nouveau développement qui pourrait avoir une incidence sur les perspectives de croissance du Japon ou la stabilité de sa monnaie. L’inflation attribuable à des facteurs internes dépendra des négociations salariales en cours et de leurs effets sur l’inflation.

Nous croyons que le cercle vertueux des hausses des salaires et des prix est appelé à durer, ce qui se traduira par un taux neutre plus élevé pour le Japon. Par conséquent, la BdJ pourrait devoir relever davantage son taux directeur pour respecter sa cible d’inflation de 2 % si le cycle salaires-prix accélère.

Nous sommes toujours d’avis que la BdJ poursuivra la normalisation de sa politique monétaire pour ramener le taux directeur nominal à 1 % d’ici la fin de l’année, même si la banque devra maintenir un équilibre délicat entre les efforts de relance, les incertitudes externes ainsi que leur incidence sur le yen et le rythme de la croissance intérieure.

 


Points de vue sur la répartition : George Efstathopoulos, gestionnaire de portefeuille

Je suis optimiste à l’égard des actions japonaises. La conjoncture intérieure s’améliore, soutenue par la forte croissance des salaires et l’élargissement de la demande qui alimente l’inflation, entraînant un changement de comportement de la consommation inédit depuis plusieurs décennies. De plus, les récents événements dans la sphère politique ont entraîné de nouvelles mesures de relance budgétaires qui soutiennent la demande intérieure; tout cela devrait faire grimper les bénéfices des sociétés à moyenne capitalisation sensibles à la situation intérieure.

Plus récemment, je suis également devenu plus optimiste à l’égard des grandes capitalisations japonaises. Les réformes des sociétés, par la hausse des versements de dividendes et les rachats d’actions, restent un facteur structurel favorable. Ce n’est pas inédit, mais la résilience des bénéfices que nous observons, si. Le Japon affiche actuellement les plus fortes révisions des bénéfices par rapport à la plupart de ses pairs des marchés développés. L’absence de réaction importante du marché boursier à la décision prise aujourd’hui par la BdJ est également un développement important qui atténue le risque; les investisseurs effrayés par l’épisode de dénouement des opérations de portage en août dernier peuvent maintenant l’oublier et se concentrer plutôt sur l’amélioration des paramètres fondamentaux.

J’ai accru mon exposition au yen à l’approche de la réunion, en m’attendant à une monnaie plus forte, et la BdJ, qui fait preuve de fermeté, a répondu à mes attentes.

L’escalade en matière de tarifs préoccupe, compte tenu de l’important excédent courant du Japon par rapport aux États-Unis, mais le Japon a une importance stratégique et, par conséquent, une entente avec la nouvelle administration devrait être conclue rapidement. De plus, le président Trump a beaucoup insisté sur le fait que les exportateurs devraient transférer leur production aux États-Unis pour éviter les tarifs, un domaine où le Japon obtient déjà de très bons résultats par rapport aux autres principaux partenaires commerciaux des États-Unis.