L’art du possible, ou pourquoi l’immobilier tracera la voie de la transition énergétique

L’art du possible, ou pourquoi l’immobilier tracera la voie de la transition énergétique

Notre environnement bâti n’est peut-être pas efficace sur le plan énergétique, mais la technologie existe déjà pour réduire considérablement sa consommation d’énergie et convertir l’ensemble du secteur aux sources renouvelables. Les rénovations énergétiques visant à rendre les bâtiments plus verts, en plus de générer une majoration de la tarification et des primes de location, signifient que le secteur immobilier jouit d’une longueur d’avance en ce qui a trait à la mise en œuvre de changements réels.

Date de publication initiale : 12 septembre 2024, par Fidelity International.
Par Adrian Benedict, chef des solutions immobilières, et Nina Flitman, rédactrice principale

Faits saillants

  • Les bâtiments durables offrent une prime aux investisseurs
  • Les constructions écologique réduisent les coûts d’exploitation pour les locataires
  • L’UE doit mettre à niveau ses bâtiments pour les rendre plus efficaces sur le plan énergétique

Les avantages des biens immobiliers qui présentent des profils de durabilité plus solides sont maintenant tellement démontrables que les acheteurs et les locataires sont disposés à payer une prime pour en bénéficier. L’immobilier est au premier plan pour les investisseurs qui veulent exploiter le thème de la transition, grâce aux progrès réalisés dans les domaines des matériaux de construction et de la technologie.

La portée des changements – et des investissements – est appréciable. L’environnement bâti est responsable d’environ 40 % de la consommation d’énergie de l’Europe[1]. Il ne s’agit pas là d’un pourcentage qu’on peut tout bonnement ramener à zéro, puisque les bâtiments auront toujours besoin d’être alimentés en électricité. Cela dit, nos bureaux, nos maisons et nos bâtiments commerciaux – dont un grand nombre datent de plusieurs décennies ou même de plusieurs siècles – n’utilisent pas toujours l’énergie de la manière la plus efficace possible, et ne tirent pas toujours parti des technologies les plus récentes. Environ 75 % du parc immobilier de l’Union européenne est inefficace sur le plan énergétique[2].  

Exploiter leur potentiel peut être relativement simple, et il ne s’agit pas de démolir nos villes pour tout rebâtir à neuf. En effet, la démolition et la construction sont les étapes du cycle de vie les plus intenses en carbone d’un bâtiment. La rénovation d’un bâtiment existant crée 60 % moins d’émissions intrinsèques que la construction d’un nouveau bâtiment[3]. Ajoutez à cela les plus récentes innovations technologiques, et vous pouvez également réduire à zéro la quantité de carbone requise pour alimenter un bâtiment.

À quoi cela ressemble-t-il? Viennent d’abord les mesures de base : poser un meilleur revêtement isolant et installer un éclairage DEL et un système de chauffage, ventilation et climatisation plus efficaces pour réduire l’énergie dont le bâtiment a besoin. Sans compter qu’un bâtiment peut générer sa propre énergie verte. Le fait d’installer des panneaux solaires ou des éoliennes sur les toits, ou de remplacer les chaudières au gaz ou au mazout traditionnelles par des thermopompes à air, peut mettre fin à la dépendance aux combustibles à base de carbone.

Par ailleurs, plusieurs nouvelles technologies en développement permettent d’envisager l’avenir avec optimisme. Ainsi, la création de panneaux photovoltaïques entièrement transparents signifie que chaque fenêtre d’un bureau ou d’une résidence pourrait produire de l’électricité solaire. Les innovations dans le domaine des matériaux durables et de leur fabrication, comme le béton carbonégatif, l’acier vert fabriqué sans combustibles fossiles, ou même les briques de mycélium fabriquées à partir de déchets organiques et de fibres de champignons, pourraient contribuer à la réduction des émissions de carbone dans l’industrie de la construction. La production de béton causant à elle seule près de 8 % des émissions mondiales de dioxyde de carbone, n’importe quelle amélioration dans ce secteur aurait un impact considérable[4].

Une longueur d’avance

L’Union européenne estime que rénover la totalité de ses bâtiments inefficaces pour les rendre plus durables pourrait réduire de 5 % à 6 % la consommation totale d’énergie de la région[5]. Il s’agit certes d’une cible ambitieuse, mais les projets individuels démontrent la mesure dans laquelle il est possible de réduire l’empreinte énergétique d’un bâtiment en le rénovant pour améliorer son efficacité énergétique. Prenons par exemple un projet de rénovation en cours dans un bâtiment de bureaux du centre de Londres. Il n’est pas question ici d’un vieux bâtiment brun décrépit : l’immeuble a été bâti au début du 21e siècle, mais à peine vingt ans plus tard, nous sommes en mesure d’améliorer radicalement son efficacité énergétique. La mise à niveau des installations au moyen de plusieurs des technologies énumérées plus haut permettra de réduire de plus de 75 % la demande d’énergie primaire du bâtiment. Une fois les travaux de rénovation terminés, le bâtiment sera carboneutre, et ne dépendra plus du tout des combustibles fossiles.

Toutes ces technologies donnent au secteur immobilier une longueur d’avance sur le plan de la transition énergétique. C’est le manque de capitaux ou de clairvoyance des gestionnaires qui explique pourquoi les bâtiments ne sont pas tous déjà dotés d’une thermopompe ou d’un réseau de panneaux solaires. Mais les capitaux sont en route. Étant donné que les bâtiments durables demeurent relativement rares en Europe – moins de 20 % des bureaux à l’échelle des grandes villes européennes détiennent un certificat vert[6] –, une prime verte attrayante est offerte à ceux qui font des acquisitions dans le secteur[7]. Selon un rapport, le rendement total des bâtiments efficaces pour la période de 12 mois terminée au deuxième trimestre de 2023 était de 1,2 point de pourcentage supérieur à celui des bâtiments inefficaces, l’écart passant à 3,2 points de pourcentage entre les bureaux inefficaces et efficaces[8].

Les locataires sont également disposés à payer davantage pour louer des locaux dans des bâtiments durables : près des trois quarts des décideurs du secteur de l’immobilier commercial affirment qu’ils sont susceptibles de payer une prime pour emménager dans un bureau qui affiche un bilan vert, et plus de la moitié d’entre eux prévoient de le faire d’ici 2025[9]. Dans la même veine, près des deux tiers des locataires d’installations logistiques, comme des entrepôts, prévoient d’atteindre la carboneutralité dans l’ensemble de leurs activités au plus tard en 2030[10]. Bien que les entreprises doivent payer un loyer plus élevé pour louer un bâtiment vert, les gains d’efficacité énergétique qu’elles réalisent leur permettent d’économiser sur leurs coûts d’exploitation et de réduire leurs dépenses globales associées à l’occupation des locaux.

Supporter la charge

Il faudra accélérer le processus d’investissement et de rénovation pour atteindre les objectifs climatiques. Près de 80 % des immeubles commerciaux existants à l’échelle de l’Union européenne devront être mis à niveau pour devenir plus efficaces[11]. Pourtant, seulement 1 % des bâtiments de la région font l’objet de rénovations énergétiques chaque année[12]

Augmenter le rythme des rénovations, aussi peu que ce soit, permettrait de réduire considérablement l’énergie consommée par le secteur immobilier. Puisque d’autres industries auront plus de difficulté à diminuer leur dépendance aux combustibles fossiles, l’accélération des améliorations dans ce secteur pourrait favoriser l’atteinte des cibles de carboneutralité même si les autres secteurs accusent un retard. Par ailleurs, si nos bâtiments parviennent à réduire la quantité d’énergie qu’ils utilisent, la demande globale d’électricité renouvelable pourrait diminuer. Cela permettrait de compenser la croissance de la demande en provenance d’autres secteurs qui ne sont pas en mesure de réduire aussi rapidement leur consommation d’énergie – une préoccupation croissante étant donné les contraintes d’approvisionnement – tout en contribuant à alléger les pressions sur les tarifs dans les secteurs difficiles à décarboner.

Les cibles établies par l’Accord de Paris sur le climat semblent de plus en plus difficiles à atteindre, et il nous reste de moins en moins de temps pour prendre les mesures nécessaires à cet égard. Les secteurs qui ont la capacité de mettre en œuvre ces changements – notamment l’immobilier – devraient agir sans tarder et tirer parti de la vague d’investissements qui en découlera.

[1] À la une : l’efficacité énergétique des bâtiments, Commission européenne

[2] À la une : l’efficacité énergétique des bâtiments, Commission européenne

[3] Energy efficiency of the building stock in the EU (en anglais seulement), RICS 

[4] Making concrete change (en anglais seulement), Chatham House Report 

[5] À la une : l’efficacité énergétique des bâtiments, Commission européenne

[6] The Value of Green Building Features (en anglais seulement), CBRE Research 

[7] Buildings that go green: making an impact while still making alpha (en anglais seulement), Fidelity International 

[8] Indice de durabilité 2023 (en anglais seulement), CBRE 

[9] The Future of Work Survey (en anglais seulement), JLL 

[10] Sondage européen sur l’opinion des utilisateurs de bureaux 2024, CBRE 

[11] Selon les données de la Royal Institute of Chartered Surveyors 

[12] Selon les données de l’Agence internationale de l’énergie